Clarifier ce qui se dit… et ce qui se cache
Dans la relation, il arrive que des mots sonnent faux, ou laissent une impression d’inconfort. Un « merci » qui gratte, un compliment qui pince, une ouverture qui se referme aussitôt. Si cela vous trouble, vous êtes peut-être face à un double discours.
Le double discours peut être une habitude. Il peut aussi devenir un signal, une porte d’entrée vers plus d’authenticité. En Gestalt, nous apprenons ensemble, comment réagir au double discours.
Dans l’article précédent, nous avons vu que le double discours est une manière de mêler deux messages contradictoires — souvent de façon inconsciente. Aujourd’hui, voyons comment le repérer… puis comment y répondre sans confusion.
🔍 Comment repérer un double discours ?
Voici quelques signes révélateurs :
1. Une impression de flou ou d’inconfort
Vous sentez que « quelque chose cloche », sans savoir exactement quoi. Le message est difficile à recevoir pleinement. L’émotion est brouillée.
2. Deux intentions opposées dans une même phrase
« C’est super ce que tu fais… mais il faut voir si ça tiendra dans le temps. »
Le message commence dans l’accueil, mais se referme aussitôt. Ce décalage crée une tension.

3. Un ton ou un regard qui contredit les mots
Un « je suis content » dit sur un ton froid, ou un sourire crispé accompagné d’un reproche voilé. Le corps trahit ce que les mots tentent de cacher.
4. Une réaction confuse ou désorientée
Si vous ne savez plus comment répondre — dire merci ? vous justifier ? — cela peut être un indice que le message n’est pas clair. L’ambivalence se glisse dans l’échange.
🛠️ Comment réagir face à un double discours ?
Une fois repéré, le double discours ne demande pas une réponse immédiate ou tranchée, mais plutôt une présence consciente à ce qu’il suscite en vous.

1. Accueillir ce que ça me fait
Avant toute réaction, je prends un temps pour écouter ce que je ressens. Malaise ? Colère ? Tristesse ? Cela me permet de ne pas répondre depuis un réflexe défensif, mais depuis mon expérience.
« Je sens que je suis un peu désorienté par ce que tu viens de dire. »
2. Nommer l’ambivalence (si le lien le permet)
Plutôt que de piéger l’autre ou de l’accuser, je peux simplement partager ce que j’entends, et inviter à clarifier :
« Je t’entends me remercier, et en même temps il y a comme une réserve. Tu veux bien me dire ce que tu ressens vraiment ? »
Ce type de formulation, inspiré de la Communication Non Violente ouvre un espace relationnel plutôt que de refermer.
3. Refuser de jouer le jeu
Si le message est trop brouillé, ou s’il me met dans un inconfort durable, je peux poser une limite :
« J’aimerais qu’on se parle plus directement, sans tourner autour du pot. Est-ce que tu serais d’accord ? »
Il ne s’agit pas de rejeter l’autre, mais de poser un cadre relationnel clair, soutenant pour les deux.
4. Faire le point en soi (c’est peut-être moi qui suis ambivalent)
Nous sommes tous susceptibles, à un moment ou un autre, de nous exprimer de façon ambivalente. Une gêne après avoir parlé, ou le sentiment que « ce n’était pas ça », sont souvent des signes que notre parole n’était pas pleinement ajustée.
En Gestalt, nous travaillons à reconnecter notre parole à notre expérience vécue, pour oser dire ce qui est là… sans l’enrober.
🌱 Ce que permet une parole claire
Quand j’ose dire ce que je ressens avec simplicité, sans contradiction interne, je donne à l’autre un appui pour m’entendre — et me rejoindre. Une parole claire soutient la relation.
Elle ne garantit pas l’accord, mais elle permet la rencontre.
En repérant les doubles discours — chez soi comme chez l’autre — on apprend à créer un espace d’échange plus sain, plus vrai, plus vivant. Oser la clarté.
Conclusion
Dans cet article, nous avons vu comment repérer un double discours et comment réagir face à un double discours.
Le double discours est souvent une défense inconsciente contre la peur de l’intimité, du rejet ou de l’erreur. En Gestalt thérapie, nous apprenons à reconnaître ces signaux pour les transformer en opportunité de présence et de vérité.
Clarifier notre parole, c’est prendre soin du lien. Et c’est une belle manière de s’ouvrir à soi… et à l’autre.

