Comment s’exprimer sans ambivalence ?
« Merci d’être dans ma vie… même si ce n’est pas toujours facile ! »
Cette phrase semble pleine de gratitude… et pourtant, elle laisse souvent un goût amer. Pourquoi ? Parce qu’elle contient deux messages contradictoires : un mouvement d’ouverture suivi d’une réserve, d’un bémol. En Gestalt, on parle ici de double discours, ou d’ambivalence relationnelle.

Qu’est-ce qu’un double discours ?
Le double discours est une façon de s’exprimer qui mêle deux intentions opposées, dans une même phrase ou un même échange. Cela crée une confusion émotionnelle chez celui qui reçoit : doit-il entendre l’appréciation, ou la critique ? Le remerciement, ou la mise à distance ?
Souvent, ce mélange n’est pas conscient. Il reflète une ambivalence intérieure : un élan sincère, freiné par une peur, une gêne ou une blessure.
Exemples courants :
« Tu as bien fait… même si tu aurais pu me demander avant. »
« Je suis content qu’on se parle, mais je ne suis pas sûr que ça change quelque chose. »
« Je t’aime, mais tu me rends fou. »
On les entend souvent, parfois sans même les remarquer. Voici quelques exemples de ces messages ambivalents.
Ceux qui laissent l’autre dans le flou
« Tu as bien parlé… pour une fois. »
« C’est touchant ce que tu dis, même si je ne suis pas d’accord. »
« Tu es vraiment doué… dommage que tu ne t’en rendes pas compte. »
❤️ Les marques d’amour teintées de reproche
« Tu me manques… mais tu m’épuises. »
« Je t’aime, mais je ne peux pas te faire confiance. »
« Je suis heureux(se) avec toi, même si tu ne me comprends jamais. »
🕊️ Les tentatives de réconciliation ambiguës
« Je ne veux plus qu’on se dispute, mais tu exagères quand même. »
« Je veux qu’on se parle calmement… alors arrête de m’énerver. »
« Je suis désolé de t’avoir blessé(e)… mais tu aurais pu éviter de réagir comme ça. »
⚡ Les formulations passives-agressives
« Je suis content de t’avoir vu, même si j’aurais préféré rester chez moi. »
« J’ai adoré ton intervention… c’était original, disons. »
« Je suis ouvert à ce que tu proposes, même si ça ne me parle pas du tout. »
🙃 Les encouragements peu encourageants
« Vas-y, lance-toi ! Tu n’as rien à perdre de toute façon. »
« Tu es sur la bonne voie… pourvu que tu ne retombes pas dans tes travers. »
« C’est bien ce que tu fais, même si ce n’est pas encore très pro. »
🧭 Chaque phrase transporte une intention double : une part d’ouverture et une part de fermeture. En Gestalt, l’enjeu est d’amener de la conscience dans cette ambivalence pour retrouver une parole plus claire, plus cohérente — et plus relationnelle

Pourquoi sommes-nous tentés de « gâcher » le bon ?
Cette tendance vient souvent de nos mécanismes de protection. Nous avons parfois du mal à assumer pleinement une émotion positive, surtout si l’intimité ou la vulnérabilité qu’elle implique nous met en insécurité.
Derrière un compliment assorti d’un bémol, il peut y avoir :
- la peur d’être rejeté si l’on se montre trop affectueux ;
- la crainte d’être dépendant ou redevable ;
- une stratégie inconsciente pour garder le contrôle ou éviter de « se livrer » totalement.
En un mot : dire du bon, c’est s’exposer. Et pour certains, c’est plus facile de teinter leur message d’une touche d’ironie, de critique ou de distance.
Les effets sur la relation
Un double discours, même léger, fragilise le lien.
Il introduit une tension, une instabilité. L’autre ne sait plus sur quel pied danser, et cela peut créer :
- du doute ou de la méfiance,
- une fermeture émotionnelle en retour,
- un besoin de clarification… ou de retrait.
En Gestalt, on cherche à ramener de la congruence dans la relation : que le message verbal, le ton, le corps et l’émotion soient alignés.
Vers une parole claire et reliée
S’exprimer sans double discours, c’est honorer à la fois notre vérité et la relation.
Cela demande du courage, parfois un peu de pratique. Mais c’est un chemin de clarté qui permet à l’autre de nous rencontrer vraiment.
En Gestalt thérapie, nous apprenons à écouter les couches contradictoires de nos messages, pour mieux les éclairer, les nommer, et oser une parole qui fait du bien — à soi comme à l’autre.
🔚 Conclusion
Dire le bon… et s’y tenir. Offrir une reconnaissance entière, sans arrière-pensée. Entendre une critique sans y glisser un « mais » rassurant.
Ce sont autant d’actes de présence à soi, et d’engagement relationnel.
Envie d’aller plus loin ?
La Gestalt thérapie permet de repérer ces doubles messages et d’en comprendre les racines. En séance, je vous accompagne pour retrouver une parole claire et relationnelle, libérée des automatismes.
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« J’ai réalisé que je disais souvent oui alors que je pensais non. Travailler là-dessus avec Philippe m’a permis d’apprendre à m’affirmer sans blesser. » — R.
J’ai écrit un autre article sur le sujet de l’expression. EXPRIMER EN 2025.

Philippe Ferrand, praticien en Gestalt thérapie à Tassin & Sain-Bel
Facilitateur de clarté et de vitalité

